François Béranger
Tiens ces jours-ci je me suis replongé dans les disques de ce bon vieux excellent et regretté François Béranger ( il nous a quittés en 2003) qui m'a accompagné dans les 70s (salut les papis !).
Dans les années 90, je l'avais perdu de vue et d'oreille, ses disques 33 tours avaient-ils été réédités sous cd ? Continuait-il à enregistrer ? Je n'en savais rien.
Et puis...il y a 4 ou 5 ans, par hasard, j'ai mis la main sur un enregistrement en public à Lille
un double cd chez Futur Acoustic.
Et là, les retrouvailles ! La voix chaude et un peu rugueuse, des arrangements musicaux plutôt intimistes dirigés par le multi-instrumentiste argentin Lalo Zanelli (guitare, piano, synthés) avec l'apport de l'accordéoniste Dider Ithurssary. De beux climats. Une atmosphère chaleureuse, flirtant parfois avec les tangos et milonga.
Il y a beaucoup d'humanité dans ce disque où affleure une fois de plus l'énorme sincérité de François Béranger avec toute sa verve populaire au sens noble du mot. Un Béranger apaisé dans ses interprétations, comme une patine prise avec l'âge, mais une colère intacte devant l'injustice et l'exclusion.
Les grandes chansons étaient là , une superbe version en entrée de Tous ces mots terribles, Le vieux, Tango de l'ennui, Natacha etc) et certaines plus récentes aussi, notamment tirées de cet album-ci qui venait de sortir à l'époque de l'enregistrement (1998).
Et pour clôturer le tout une reprise magnifique de Félix Leclerc ( dont Béranger était un très grand admirateur) La Chanson du Pharmacien à laquelle s'ajoute une mise en musique de Marizibill poème d'Appolinaire.
Pour qui ne connaîtrait pas Béranger, ce double cd en public me semble une excellente entrée en matière si on veut aller à la rencontre de ses chansons. Elles valent le détour.
K
Note / ci-dessous les textes de deux de mes préférées pour des raisons distinctes...
1. TOUS CES MOTS TERRIBLES
Tous ces mots terribles qui font des chansons
parlant de misère, d’ennui, de prison,
ne sont que des leurres chassant nos démons.
Bâillonnant la peur, pendant un moment.
Chanter, c'est pas vivre, mais c'est l'espérer.
Chanter, c'est survivre, quand on est vidé.
Vidé de ses illusions, tout nu et tout con.
Essoré, déboussolé, cassé, piétiné.
Je ne suis ni meilleur ni plus mauvais que vous.
Contre vents et marées, envers et contre tout,
j'ai chevillé dans le coeur un rêve de bonheur.
Un jour nouveau qui se lève chasse mon chagrin.
Un geste, un regard, un mot, un ami qui vient,
deux arbres dressés dans le ciel, la lune et la nuit
Deux amoureux dans un champ
font comme leurs parents.
Une fille qui revient d'un voyage très loin.
Tous ces mots terribles qui font des chansons...
2. NOUS SOMMES INCAS
Nous sommes un cas, nous sommes un cas
un cas pathologique
Nous sommes un cas, nous sommes un cas
un cas anachronique
Nous avons bien trop tardé
à faire nous aussi du sud-américain
Nous avons bien trop tardé
à grossir les rangs de tous les faux indiens
Quand on fait de la musique
faut avoir l'esprit pratique
il faut savoir exploiter
le goût immodéré
des gens pour l'exotique
Surtout pas se mettre en tête
originalité et authenticité
Aïe! Aïe! Aïe! Aïe!
Voilà les grands mots lâchés
Aïe! Aïe! Aïe! Aïe!
Si on fait dans les idées
on va sûrement être exclus
de la fraternité des chanteurs à succès
A la place d'un tas d'dollars
on va tout juste avoir
sifflets et quolibets
Nous sommes un cas, nous sommes un cas
un cas pathologique
Nous sommes un cas, nous sommes un cas
un cas anachronique
la musique des indiens
ou celle des mexicains
ou celle des colombiens
ça nous dit seulement misère
sécheresse de le terre
pouvoir des militaires
Peuples écartelés
villages abandonnés
bidonvilles surpeuplés
avec plein d'enfants bien sous-alimentés
et les prisons infernales
où sévissent tortures
carnages et pourriture
Aïe! Aïe! Aïe! Aïe!
c'est pas ça qu'il faudrait dire
Aïe! Aïe! Aïe! Aïe!
On ne va pas s'en sortir
On ne va pas réussir
à faire la chanson
qui donne envie de partir
La chanson publicitaire
pour remplir les charters
de joyeux vacanciers
Nous sommes un cas,
nous sommes un cas
un cas pathologique ...
(évidemment une somptueuse poilade 3e degré qu'il vaut mieux écouter aussi parce que la musique déconne pas mal dans le genre clichés !)